20 mars 1811 : Un héritier pour Napoléon 1er.
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20 mars 1811 : Un héritier pour Napoléon 1er.
20 mars 1811 : Un héritier pour Napoléon 1er.
Moins d'un an après leur mariage, Napoléon 1er et Marie-Louise s'apprêtent à accueillir leur premier enfant.
On imagine l'ambiance tendue qui règne aux Tuileries ce 20 mars 1811. D'autant que le bébé se présente par les pieds, et non la tête.
La consternation est totale, au point que le docteur Dubois demande à Napoléon Ier qui faut-il sauver en cas de danger, la mère ou l'enfant ? «Allons donc, répond l'Empereur pâle comme la mort, ne perdez pas la tête : sauvez la mère, ne pensez qu'à la mère».
Après 26 minutes de travail, «avec les ferrements», l'enfant vient au monde à 9h15 du matin. Mais on le croit mort : il reste près de 7 minutes «sans donner aucun signe de vie».
Dubois, assisté de Corvisart, s'active de son mieux : friction, serviettes chaude, quelques gouttes d'eau de vie dans la bouche... Les méthodes se révèlent efficaces.
«Eh bien Constant ! lance l'Empereur à son fidèle valet de chambre. Nous avons un gros garçon ! Mais il s'est fait joliment tirer l'oreille, par exemple...»
Un berceau très politique
Évènement politique et «people» sans précédent, la naissance du premier fils légitime de Napoléon Ier intervient au moment où son Empire domine l'Occident et le monde moderne. Avec cet enfant de sang impérial par sa mère, Bonaparte caresse l'espoir d'entrer dans le cercle des vieilles dynasties. Il mise pour cela sur une propagande soignée.
Ce jour-là, la stratégie politique de l'Empereur se consolide de façon stupéfiante : d'abord, il a un fils, un héritier mâle, et peut donc fonder sa dynastie dans les pas de Clovis, en imprimant son propre sang dans l'Histoire de France.
Ensuite, il fortifie son alliance avec l'Autriche et son cousinage avec les familles régnantes européennes, déjà amorcée à travers son mariage avec Marie-Louise, supprimant à ses yeux un ennemi potentiel : jamais, espère-t-il, l'empereur d'Autriche François 1er ne pourra attaquer le futur royaume de son propre petit-fils...
Le rapprochement avec l'Autriche devient la clé de sa politique étrangère : face à l'Angleterre, ennemi farouche de Bonaparte, la Prusse est affaiblie et la Russie reste pour l'instant soumise (pour affermir son alliance, Napoléon Ier avait un temps envisagé la possibilité d'épouser une princesse russe, Anne, la propre sœur du Tsar Alexandre 1er). Enfin, l'arrivée de cet enfant issu d'un sang autrichien redore l'image d'un empire dont les fondations trempent dans la Révolution Française... et le sang de Marie-Antoinette, une autre souveraine d'origine autrichienne.
«L'alliance de Votre majesté avec une fille de la Maison d'Autriche sera un acte expiatoire de la part de la France», souligne l'habile Talleyrand. En effet, l'enfant est l'arrière petit-neveu de Marie-Antoinette et de Louis XVI, puisque l'ancienne reine de France était la soeur de Marie-Caroline de Naples et de Joseph II d'Autriche, grands-parents de Marie-Louise. Aux yeux de Napoléon, cet enfant, tel Janus, représente à la fois la nouveauté et la continuité, l'avenir de l'Europe, la chance de la France pour s'imposer et se faire accepter sur le continent des rois. Et donc déboucher enfin sur une paix définitive.
Le fils de l'«Empereur des rois»
Après l'émotion, la politique reprend ses droits : il faut que l'héritier naisse dans la pourpre, qu'il soit d'emblée honoré comme le fils de l'Empereur des rois. Et la propagande napoléonienne va fonctionner à plein régime.
Le nouveau-né est déposé dans son berceau d'apparat, offert deux semaines plus tôt par la ville de Paris, composé d'une nacelle décorée de balustres en nacre sur fond de velours parsemé d'abeilles dorées. D'une facture d'un luxe inouï, il est surmonté d'une double couronne d'étoiles et de lauriers d'où tombent des rideaux : c'est la gloire du père qui veille sur le fils.
Le prince archichancelier Cambacérès dicte l'acte de naissance que signent les deux témoins, le vice-roi d'Italie Eugène de Beauharnais et le grand-duc de Wurzbourg, oncle de Marie-Louise.
Les prénoms donnés au nouveau-né sont lourds de sens : Napoléon, bien sûr, François (comme son grand-père maternel, Empereur d'Autriche), Charles (son grand-père paternel), et Joseph, prénom de son parrain, roi des Espagne et des Indes.
Dès sa naissance, l'enfant est titré : il est roi de Rome, façon de rappeler à un pape récalcitrant - Pie VII est à l'époque prisonnier de Napoléon - que la ville sainte n'est que le chef-lieu de l'un des 130 départements de l'Empire.
C'est aussi une façon de s'inscrire dans l'Histoire, dans la succession des Césars, des souverains de l'Occident, mais aussi du Saint Empire germanique, puisque la tradition voulait que son successeur désigné porte le titre de «Roi des Romains». Mais François 1er, beau-père de l'Empereur des Français, ne peut qu'être blessé par ce titre, lui qui a dû renoncer au titre d'Empereur germanique pour celui d'Empereur d'Autriche.
La nouvelle de la naissance est proclamée urbi et orbi : elle fuse immédiatement aux quatre coins du Royaume, auprès des ambassadeurs et des grandes villes, par l'intermédiaire des pages et des courriers. Prévenue, Joséphine se fend d'un mot à son ex-époux : «Mon sacrifice n'aura pas été inutile». L'empereur se montre prodigue et affiche son bonheur... et sa puissance. L'accoucheur Dubois reçoit 100.000 francs, 50.000 francs sont distribués aux mères nécessiteuses, 100 000 francs pour dégager le Mont de Piété, et 100.000 francs donnés à 2526 pères de familles débiteurs des mois de nourrice.
7200 invités au baptême
Le faste et la symbolique qui accompagne les rites viennent alors souligner l'importance de l'événement. L'ordre est donné de tirer les 101 coups de canons protocolaires pour la naissance d'un fils (21 prévus pour une fille), et dès le 22e coup tiré, le peuple parisien laisse éclater sa joie, «un long cri qui partit comme un mouvement électrique», rapporte la comtesse de Boigne, témoin de la liesse.
La même procédure est exécutée dans les grandes villes et les ports de l'Empire, les flottes doivent être pavoisées. Les cloches du royaume, le bourdon de Notre-Dame en tête, sonnent sans arrêt du matin au soir, les Parisiens illuminent immeubles et maisons.
Et tandis que des feux d'artifices sont tirés un peu partout, l'Empereur préside l'ondoiement de son fils dès 9 heures du soir au Palais. Il s'agit d'un baptême de précaution, pour le cas où le nourrisson viendrait à mourir prématurément. Pour l'occasion, Napoléon veut frapper les esprits en rétablissant la coutume dynastique.
Le cortège traverse les Tuileries jusqu'à la chapelle où le bébé est ondoyé par le Grand Aumônier de l'Empire, le cardinal Fesch, au cours d'une cérémonie somptueuse, en présence de toute la Cour. Répétition générale du baptême officiel qui aura lieu en juin, au cœur même de Notre-Dame, lieu même du sacre plus de six ans auparavant, devant plus de 7200 invités dont toute la famille impériale, la Cour et les grand corps de l'État.
Après avoir embrassé trois fois son fils, Napoléon Ier le prend et l'élève très haut dans le ciel, tandis que le chef des Hérauts crie par trois fois : «Vive le roi de Rome !». L'Empereur envisagera même de faire couronner son fils Roi de Rome dans la ville sainte, par le pape lui-même, mais les circonstances ne le permettront pas.
«L'avenir n'appartient à personne»
En 1835, trois ans après la mort du Roi de Rome, en pleine napoleomania, le jeune Victor Hugo publie un vibrant poème sur la destinée météorique du Roi de Rome :
«Quand il eut bien fait voir l'héritier de ses trônes
Aux vieilles nations comme aux vieilles couronnes,
Eperdu, l'œil fixé sur quiconque était roi,
Comme un aigle arrivé sur une haute cime,
Il cria tout joyeux avec un air sublime :
- L'avenir ! l'avenir ! l'avenir est à moi !
Non, l'avenir n'est à personne !
Sire, l'avenir est à Dieu !»(Victor Hugo, Les Chants du Crépuscule, 1835)
Un futur grand palais à Chaillot
Se développe alors très vite toute une imagerie autour de l'enfant symbole : les artistes rivalisent d'imagination pour plaire, flatter et... vendre tout ce qui rappelle une naissance tant souhaitée. Peintures, estampes, gravures, poèmes, compositions musicales, médailles, bustes en marbre ou en céramique louent la gloire du petit roi ou rappellent ses traits : le voilà représenté en bambin ou en majesté, dans les bras de son père ou en buste classique. Car gouverner, c'est aussi montrer sa face, se faire connaître et reconnaître.
Grand Aigle de la légion d'Honneur, Grand-Croix de la couronne de fer, le bambin reçoit également la Toison d'Or et on doit l'appeler Sire ou Votre Majesté.
Son rang est primordial et s'affiche dès sa naissance, Napoléon souhaitant lui offrir l'éducation et l'existence réservée aux enfants issus de haute condition depuis l'Ancien régime. Il dispose ainsi d'une Maison - une suite à son service exclusif - composée d'une bonne vingtaine de personnes dont des gouvernantes, des berceuses, une nourrice, un écuyer, un médecin, un chirurgien, un maître d'hôtel, des filles de garde-robe, un huissier, etc.
Tout ce petit monde évolue sous l'autorité de Madame la comtesse de Montesquiou, rescapée de l'aristocratie d'Ancien Régime. Dès le 22 octobre 1810, soit bien avant la naissance de l'enfant, elle a été nommée par l'Empereur gouvernante des Enfants de France. À ce titre, elle est chargée d'éduquer le Roi de Rome et débuter son instruction et notamment l'apprentissage de la lecture, avant la nomination d'un précepteur.
Les appartements du prince impérial s'étendent sur une enfilade de 10 pièces au rez-de-chaussée des Tuileries, avec vue sur le Carrousel. Comme fils de conquérant, on veut le familiariser aux métiers des armes, à l'histoire des uniformes. Dans ses jouets on retrouve ainsi un modèle réduit de pièce d'artillerie.
Très vite, l'enfant est abonné à plusieurs journaux, comme Le Moniteur ou La Gazette de France et dispose d'un piano à 30 octaves dès décembre 1811. Très vite, Napoléon envisage de bâtir un immense palais pour son fils sur la colline de Chaillot, souhaitant inscrire ainsi son tout jeune règne dans la pierre.
L'Histoire en décidera autrement. Ce souci constant, ce rêve de pérenniser cet Empire conquis par les armes, finit par s'embourber dans les glaces de la Russie. Trois ans plus tard, l'enfant, que Victor Hugo surnommera bien plus tard l'«Aiglon», quitte la terre de France et va connaître la vie d'un enfant en exil.
Marc Fourny
Une semaine d'Histoire du 19 Mars 2012 au 25 Mars 2012 avec Herodote.net
Moins d'un an après leur mariage, Napoléon 1er et Marie-Louise s'apprêtent à accueillir leur premier enfant.
On imagine l'ambiance tendue qui règne aux Tuileries ce 20 mars 1811. D'autant que le bébé se présente par les pieds, et non la tête.
La consternation est totale, au point que le docteur Dubois demande à Napoléon Ier qui faut-il sauver en cas de danger, la mère ou l'enfant ? «Allons donc, répond l'Empereur pâle comme la mort, ne perdez pas la tête : sauvez la mère, ne pensez qu'à la mère».
Après 26 minutes de travail, «avec les ferrements», l'enfant vient au monde à 9h15 du matin. Mais on le croit mort : il reste près de 7 minutes «sans donner aucun signe de vie».
Dubois, assisté de Corvisart, s'active de son mieux : friction, serviettes chaude, quelques gouttes d'eau de vie dans la bouche... Les méthodes se révèlent efficaces.
«Eh bien Constant ! lance l'Empereur à son fidèle valet de chambre. Nous avons un gros garçon ! Mais il s'est fait joliment tirer l'oreille, par exemple...»
Un berceau très politique
Évènement politique et «people» sans précédent, la naissance du premier fils légitime de Napoléon Ier intervient au moment où son Empire domine l'Occident et le monde moderne. Avec cet enfant de sang impérial par sa mère, Bonaparte caresse l'espoir d'entrer dans le cercle des vieilles dynasties. Il mise pour cela sur une propagande soignée.
Ce jour-là, la stratégie politique de l'Empereur se consolide de façon stupéfiante : d'abord, il a un fils, un héritier mâle, et peut donc fonder sa dynastie dans les pas de Clovis, en imprimant son propre sang dans l'Histoire de France.
Ensuite, il fortifie son alliance avec l'Autriche et son cousinage avec les familles régnantes européennes, déjà amorcée à travers son mariage avec Marie-Louise, supprimant à ses yeux un ennemi potentiel : jamais, espère-t-il, l'empereur d'Autriche François 1er ne pourra attaquer le futur royaume de son propre petit-fils...
Le rapprochement avec l'Autriche devient la clé de sa politique étrangère : face à l'Angleterre, ennemi farouche de Bonaparte, la Prusse est affaiblie et la Russie reste pour l'instant soumise (pour affermir son alliance, Napoléon Ier avait un temps envisagé la possibilité d'épouser une princesse russe, Anne, la propre sœur du Tsar Alexandre 1er). Enfin, l'arrivée de cet enfant issu d'un sang autrichien redore l'image d'un empire dont les fondations trempent dans la Révolution Française... et le sang de Marie-Antoinette, une autre souveraine d'origine autrichienne.
«L'alliance de Votre majesté avec une fille de la Maison d'Autriche sera un acte expiatoire de la part de la France», souligne l'habile Talleyrand. En effet, l'enfant est l'arrière petit-neveu de Marie-Antoinette et de Louis XVI, puisque l'ancienne reine de France était la soeur de Marie-Caroline de Naples et de Joseph II d'Autriche, grands-parents de Marie-Louise. Aux yeux de Napoléon, cet enfant, tel Janus, représente à la fois la nouveauté et la continuité, l'avenir de l'Europe, la chance de la France pour s'imposer et se faire accepter sur le continent des rois. Et donc déboucher enfin sur une paix définitive.
Le fils de l'«Empereur des rois»
Après l'émotion, la politique reprend ses droits : il faut que l'héritier naisse dans la pourpre, qu'il soit d'emblée honoré comme le fils de l'Empereur des rois. Et la propagande napoléonienne va fonctionner à plein régime.
Le nouveau-né est déposé dans son berceau d'apparat, offert deux semaines plus tôt par la ville de Paris, composé d'une nacelle décorée de balustres en nacre sur fond de velours parsemé d'abeilles dorées. D'une facture d'un luxe inouï, il est surmonté d'une double couronne d'étoiles et de lauriers d'où tombent des rideaux : c'est la gloire du père qui veille sur le fils.
Le prince archichancelier Cambacérès dicte l'acte de naissance que signent les deux témoins, le vice-roi d'Italie Eugène de Beauharnais et le grand-duc de Wurzbourg, oncle de Marie-Louise.
Les prénoms donnés au nouveau-né sont lourds de sens : Napoléon, bien sûr, François (comme son grand-père maternel, Empereur d'Autriche), Charles (son grand-père paternel), et Joseph, prénom de son parrain, roi des Espagne et des Indes.
Dès sa naissance, l'enfant est titré : il est roi de Rome, façon de rappeler à un pape récalcitrant - Pie VII est à l'époque prisonnier de Napoléon - que la ville sainte n'est que le chef-lieu de l'un des 130 départements de l'Empire.
C'est aussi une façon de s'inscrire dans l'Histoire, dans la succession des Césars, des souverains de l'Occident, mais aussi du Saint Empire germanique, puisque la tradition voulait que son successeur désigné porte le titre de «Roi des Romains». Mais François 1er, beau-père de l'Empereur des Français, ne peut qu'être blessé par ce titre, lui qui a dû renoncer au titre d'Empereur germanique pour celui d'Empereur d'Autriche.
La nouvelle de la naissance est proclamée urbi et orbi : elle fuse immédiatement aux quatre coins du Royaume, auprès des ambassadeurs et des grandes villes, par l'intermédiaire des pages et des courriers. Prévenue, Joséphine se fend d'un mot à son ex-époux : «Mon sacrifice n'aura pas été inutile». L'empereur se montre prodigue et affiche son bonheur... et sa puissance. L'accoucheur Dubois reçoit 100.000 francs, 50.000 francs sont distribués aux mères nécessiteuses, 100 000 francs pour dégager le Mont de Piété, et 100.000 francs donnés à 2526 pères de familles débiteurs des mois de nourrice.
7200 invités au baptême
Le faste et la symbolique qui accompagne les rites viennent alors souligner l'importance de l'événement. L'ordre est donné de tirer les 101 coups de canons protocolaires pour la naissance d'un fils (21 prévus pour une fille), et dès le 22e coup tiré, le peuple parisien laisse éclater sa joie, «un long cri qui partit comme un mouvement électrique», rapporte la comtesse de Boigne, témoin de la liesse.
La même procédure est exécutée dans les grandes villes et les ports de l'Empire, les flottes doivent être pavoisées. Les cloches du royaume, le bourdon de Notre-Dame en tête, sonnent sans arrêt du matin au soir, les Parisiens illuminent immeubles et maisons.
Et tandis que des feux d'artifices sont tirés un peu partout, l'Empereur préside l'ondoiement de son fils dès 9 heures du soir au Palais. Il s'agit d'un baptême de précaution, pour le cas où le nourrisson viendrait à mourir prématurément. Pour l'occasion, Napoléon veut frapper les esprits en rétablissant la coutume dynastique.
Le cortège traverse les Tuileries jusqu'à la chapelle où le bébé est ondoyé par le Grand Aumônier de l'Empire, le cardinal Fesch, au cours d'une cérémonie somptueuse, en présence de toute la Cour. Répétition générale du baptême officiel qui aura lieu en juin, au cœur même de Notre-Dame, lieu même du sacre plus de six ans auparavant, devant plus de 7200 invités dont toute la famille impériale, la Cour et les grand corps de l'État.
Après avoir embrassé trois fois son fils, Napoléon Ier le prend et l'élève très haut dans le ciel, tandis que le chef des Hérauts crie par trois fois : «Vive le roi de Rome !». L'Empereur envisagera même de faire couronner son fils Roi de Rome dans la ville sainte, par le pape lui-même, mais les circonstances ne le permettront pas.
«L'avenir n'appartient à personne»
En 1835, trois ans après la mort du Roi de Rome, en pleine napoleomania, le jeune Victor Hugo publie un vibrant poème sur la destinée météorique du Roi de Rome :
«Quand il eut bien fait voir l'héritier de ses trônes
Aux vieilles nations comme aux vieilles couronnes,
Eperdu, l'œil fixé sur quiconque était roi,
Comme un aigle arrivé sur une haute cime,
Il cria tout joyeux avec un air sublime :
- L'avenir ! l'avenir ! l'avenir est à moi !
Non, l'avenir n'est à personne !
Sire, l'avenir est à Dieu !»(Victor Hugo, Les Chants du Crépuscule, 1835)
Un futur grand palais à Chaillot
Se développe alors très vite toute une imagerie autour de l'enfant symbole : les artistes rivalisent d'imagination pour plaire, flatter et... vendre tout ce qui rappelle une naissance tant souhaitée. Peintures, estampes, gravures, poèmes, compositions musicales, médailles, bustes en marbre ou en céramique louent la gloire du petit roi ou rappellent ses traits : le voilà représenté en bambin ou en majesté, dans les bras de son père ou en buste classique. Car gouverner, c'est aussi montrer sa face, se faire connaître et reconnaître.
Grand Aigle de la légion d'Honneur, Grand-Croix de la couronne de fer, le bambin reçoit également la Toison d'Or et on doit l'appeler Sire ou Votre Majesté.
Son rang est primordial et s'affiche dès sa naissance, Napoléon souhaitant lui offrir l'éducation et l'existence réservée aux enfants issus de haute condition depuis l'Ancien régime. Il dispose ainsi d'une Maison - une suite à son service exclusif - composée d'une bonne vingtaine de personnes dont des gouvernantes, des berceuses, une nourrice, un écuyer, un médecin, un chirurgien, un maître d'hôtel, des filles de garde-robe, un huissier, etc.
Tout ce petit monde évolue sous l'autorité de Madame la comtesse de Montesquiou, rescapée de l'aristocratie d'Ancien Régime. Dès le 22 octobre 1810, soit bien avant la naissance de l'enfant, elle a été nommée par l'Empereur gouvernante des Enfants de France. À ce titre, elle est chargée d'éduquer le Roi de Rome et débuter son instruction et notamment l'apprentissage de la lecture, avant la nomination d'un précepteur.
Les appartements du prince impérial s'étendent sur une enfilade de 10 pièces au rez-de-chaussée des Tuileries, avec vue sur le Carrousel. Comme fils de conquérant, on veut le familiariser aux métiers des armes, à l'histoire des uniformes. Dans ses jouets on retrouve ainsi un modèle réduit de pièce d'artillerie.
Très vite, l'enfant est abonné à plusieurs journaux, comme Le Moniteur ou La Gazette de France et dispose d'un piano à 30 octaves dès décembre 1811. Très vite, Napoléon envisage de bâtir un immense palais pour son fils sur la colline de Chaillot, souhaitant inscrire ainsi son tout jeune règne dans la pierre.
L'Histoire en décidera autrement. Ce souci constant, ce rêve de pérenniser cet Empire conquis par les armes, finit par s'embourber dans les glaces de la Russie. Trois ans plus tard, l'enfant, que Victor Hugo surnommera bien plus tard l'«Aiglon», quitte la terre de France et va connaître la vie d'un enfant en exil.
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À mon très grand ami Patrice († 58).
À ma petite belle-fille Gaëlle († 31).
Décor "simpliste" sur lequel nous avions rejoué, à 9 joueurs, la Bataille d'Eylau en 1807.
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